2014年11月19日

Un rapport préliminaire sur des erreurs qui se trouvent dans des transcriptions faites par Jacques-Alain Miller du Séminaire XX Encore de Jacques Lacan



Un rapport préliminaire sur des erreurs qui se trouvent dans des transcriptions faites par Jacques-Alain Miller du Séminaire XX Encore de Jacques Lacan.

  Jacques-Alain Miller dit dans sa Notice ajoutée au Séminaire XVII de Lacan, que « le lecteur pourra participer à l’établissement du texte en m’adressant, à l’adresse de l’éditeur, des observations, voire des corrections, dont je tiendrai compte volontiers ».
  Mais depuis le commencement de la publication du Séminaire en 1973, malgré beaucoup d’indications et de démonstrations faites de problèmes et d’erreurs que comportent les textes qu’il a établis, Jacques-Alain Miller n’en fait aucune correction ni amélioration.
  Donc je présenterai ici à tous ceux qui lisent Lacan, quelques observations d’erreurs qui se trouvent dans des textes millériens. Il s’agit de la séance du 16 janvier 1973 du Séminaire XX Encore publié en 1975, c’est-à-dire du vivant de Lacan.
  Dans l’Avant-Propos du Transfert dans tous ses errata publié des Éditions E.P.E.L. en 1991, on dit : « La récente publication aux éditions du Seuil du séminaire tenu par Jacques Lacan en 1960-1961 permet d'interroger – pour la première fois de façon effective – la pertinence du mode d'établissement élaboré par J.-A. Miller. (...) Les parutions précédentes de six autres séminaires ne soulevaient pas le même problème. Pourquoi ? Les lecteurs les mieux avertis ne pouvaient alors comparer le texte de J.-A. Miller qu'avec des versions enregistrées souvent peu audibles, ou d'autres versions dactylographiées n'offrant pas plus de garantie ; de même pour les privilégiés en possession de la sténotypie du séminaire, où l'erreur fourmille en effet, là aussi, tant du fait d'une transcription principalement basée sur le son, que des aléas de la parole de Lacan. Cette seule comparaison était jugée, la plupart du temps, plutôt à l'avantage de la transcription plus lisse faite par J.-A. Miller, qui écarte un certain nombre d'erreurs manifestes souvent cocasses – à la condition, il est vrai, d'un sérieux rabotage de l'énonciation. Mais tel pouvait paraître alors le prix à payer pour passer d'un texte aux allures de palimpseste à une publication prétendument plus lisible. »
  Maintenant que la situation a changé grâce à des efforts continuels précieux de quelques uns de nos collègues lacaniens, nous pouvons remarquer plus facilement qu’auparavant des problèmes que comportent les transcriptions millériennes.

1. « thètiser »
  Tout récemment, pour faire des commentaires sur le concept lacanien du temps à partir du Temps logique et l’assertion de certitude anticipée dans un séminaire de l’École lacanienne de Tokyo dont je suis le responsable, j’ai relu un passage du Séminaire Encore où Lacan fait lui-même un commentaire sur son écrit de 1945. Et quand j’ai trouvé dans le texte millérien cette phrase : « la fonction de la hâte, c’est déjà ce petit a qui la thètise » (p.47), je me suis demandé tout naturellement ce que voudrait dire exactement ce verbe étrange « thètiser ». Donc j’ai écouté l’enregistrement sonore de la séance du 16 janvier 1973 où Lacan aurait dû l’énoncer.
  Et là, à ma grande surprise, Lacan ne dit pas du tout que « la fonction de la hâte, c’est déjà ce petit a qui la thètise », mais ceci : « la fonction de la hâte, c’est la fonction de ce petit a, petit a té ».
  Je pense que dans ce « a té », on pourrait lire « hâter ».
  Le conte logique de trois prisonniers que Lacan nous présente dans Le temps logique pourrait être une réponse-résolution qu’il donne au Huis clos de Sartre. Dans la pièce sartrienne, trois personnes se trouvent dans une situation infernale sans issue, intriquées dans leur relations imaginaires de regard a - a’. Par contre, Lacan qui dit que « les impasses qui s’en révèlent sont par elle-même, pour nous, un accès possible à l’être » (Encore, p.48) nous indique la possibilité de salut par le moyen symbolique et logique : « j’ai mis là en valeur le fait que quelque chose comme une intersubjectivité peut aboutir à une issue salutaire » (ibid., p.47).
  Pour se sauver, il faut se hâter : « je me hâte de m’affirmer pour être un blanc, pour que ces blancs, par moi ainsi considérés, ne me devancent pas à se reconnaître pour ce qu’ils sont » (Écrits, p.206).
  Et qu’est-ce que la hâte, sinon un terme allégorique qui désigne le désir inconscient ?
  D’ailleurs, Lacan dit dans la Position de l’inconscient : « L’attente de l’avènement de cet être dans son rapport avec ce que nous désignions comme le désir de l’analyste (...), voilà le ressort vrai et dernier de ce qui constitue le transfert » (Écrits, p.844).
  Donc il ne s’agit pas simplement de se hâter ou d’attendre. Il faudrait se hâter et attendre : se hâter avec une attente persévérente et attendre avec une tention hâtive. Et par cette persistance de désir sera advenue la « genèse logique du je » (Écrits, p.208), lequel je est le « sujet de l’assertion conclusive » anticipée (ibid.).
  Ainsi, toute la pensée de Lacan dans Le temps logique concerne la fin de l’analyse et l’avènement événementiel de l’être (Ereignis heideggérien) au moment de la fin de l’analyse.
  Si le terme « hâte » désigne le désir inconscient, la phrase de Lacan : « la fonction de la hâte, c’est la fonction de ce petit a, petit a té [ hâter ] » devrait être équivalente à cette proposition sienne selon laquelle l’objet a est la cause matérielle du désir.
  En effet, Lacan dit : « [ au niveau de ] ce que supporte chacun des [ trois ] sujets (...) d’être, par rapport aux deux autres, celui qui est l’enjeu de leur pensée, (...) chacun n’intervient dans ce ternaire qu’au titre de cet objet a qu’il est sous le regard des [ deux ] autres » (Encore, p.47). Et chacun des trois sujets, « au point du a, se réduit (...) à un Un plus a » (ibid.).
  Cet Un, le Un parménidien, est la vérité de l’être du sujet en tant qu’ex-sistence. Nous pouvons écrire selon le mathème lacanien de représentation subjective  agent / vérité :

a / Un
 
  Et parce que l’être du sujet est le manque à être du sujet qui est le désir inconscient, nous pouvons écrire cette équivalence :

a / Un  ≡  a / désir

  Là, le mathème   a / désir  veut dire que l’objet a est la cause matérielle du désir.
  Certes, par le verbe « thètiser » qu’il semble dériver du nom « thèse », Jacques-Alain Miller voudrait dire que le a en tant que signifiant constitue le désir, comme Lacan dit que « la parole constitue le sujet en sa vérité » (Écrits, p.353).
  Mais là, Lacan ne néologise pas du tout, mais bien il équivoque en disant : « petit a té [ hâter ] ». L’objet a hâte l’assertion de la vérité du sujet, autrement dit, l’objet a presse le sujet dans la recherche de sa vérité. Et par cette hâte, dans cette hâte, se constitue le sujet en tant que « sujet de l’assertion conclusive » anticipée (Écrits, p.208).

2. « l’être »
  En écoutant l’enregistrement sonore de la séance du 16 janvier 1973, j’ai remarqué deux autres transcriptions problématiques de Jacques-Alain Miller.
  Aux lignes 3 - 5 de la page 47 de l’Encore, on lit : « prendre le langage comme ce qui fonctionne pour suppléer l’absence de la seule part du réel qui ne puisse pas venir à se former de l’être, à savoir le rapport sexuel » (souligné par le citeur).
  Mais de quoi parle Lacan juste avant ce passage-là, sinon de lettre ? En se référant à la théorie des ensembles, Lacan dit que « les lettres font les assemblages, les lettres sont (...) ces assemblages, elles sont prises comme fonctionnant comme ces assemblages mêmes » (Encore, p.46).
  Donc tout naturellement on devrait entendre Lacan dire que « l’absence de la seule part du réel qui ne puisse pas venir à se former de lettres, à savoir le rapport sexuel », ce qui est tout à fait conséquent avec la définition que Lacan donne dans l’Encore même du réel comme ce qui ne cesse pas de ne pas s’écrire.

3. « existence »
  Enfin, aux lignes 9 - 11 à partir du bas de la page 43 de l’Encore, on lit : « Cet Un s’y trouve dans cet état qu’on peut appeler l’existence, car comment pourrait-il être support du ‹ prendre connaissance › s’il n’était pas existant ? » (souligné par le citeur).
  Mais dans l’enregistrement sonore, à la place de « existence » et « existant », on entend Lacan dire « ex-sistence » et « ex-sistant ».
  Dans ce passage, Lacan parle du monde en tant que le tout, c’est-à-dire, dans la terminologie heideggérienne, das Seiende als solches im Ganzen, l’étant comme tel dans sa totalité. Et par rapport à ce tout, des cosmologies mythologiques supposent un Un qui puisse en prendre connaissance et le maintenir, le faire subsister. La supposition d’un tel Un, Lacan l’appelle d’ailleurs « l’hypothèse Dieu » (Encore, p.44).
  Donc il est tout à fait certain que Lacan dit « ex-sistence » et « ex-sistant » au sujet d’un tel Un qui ex-siste au tout, c’est-à-dire, qui subsiste hors du tout.

Conclusion
  Du vivant de Lacan ont été parus les livres I, II, XI et XX de son Séminaire. Mais étant donné que même dans l’Encore se trouvent des transcriptions problématiques, il est très probable que Lacan n’a pas vérifié les textes établis par Jacques-Alain Miller avant leur parutions.
  Nous sommes bien sûr reconnaissant à Jacques-Alain Miller de tous ses efforts d’étabilissment de texte du Séminaire de Lacan et de ses enseignements faits sous le titre de l’Orientation lacanienne. Sans lui nous serions restés tout à fait désorientés dans la forêt dense de l’enseignement de Jacques Lacan.
  Mais il est évident que Jacques-Alain Miller n’est pas infaillible. Chaque lecteur de Lacan pourrait et devrait continuer ses propres efforts d’établissement de texte du Séminaire de Lacan.

à Tokyo, le 19 novembre 2014

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